Afficher On pense avec les pieds sur une carte plus grande

samedi 10 septembre 2011

Bzzzzz

Un bourdon femelle car avec du pollen, les mâles ne font rien - "Nature en beauté"


Je vous dis : abeille. Vous répondez : ruche, miel, Maya peut-être. Non !... faux ! nul ! zéro !

Comme je suis généreux, je ne vous mets pas 0, mais vous donne 1. Pas 1/20, mais 1/1000. C'est mieux que rien, pour la molécule de glucose que vous avez du casser pour fournir l'énergie de donner la réponse.

1/1000. C'est peu. C'est confondant et ça interdit. En mille : ça remet en place. Au lendemain, on commence à remettre en ordre. On a ouvert le dictionnaire, mais les pages sont mélangées. Mais la veille, le dictionnaire encore fermé, on ne sait même pas qu'on vaut 1/1000, on pense savoir, connaître, être dans son bon droit. Rien de plus faux. Notre ignorance est abyssale. Je le sais. Je crois même le savoir trop (et c'est, de mon analyse, ce qui me vaut d'être vu comme arrogant ou méprisant par beaucoup de lecteurs). Je le sais, c'est si souvent vérifié, c'est un gouffre qui s'ouvre chaque jour.
Aujourd'hui est le jour des abeilles. Qu'ont ces petites bestioles d'intéressant pour l'être humain ? Elles font le miel. Oui, et quelles en soient remerciées ! C'est entendu. Mais, c'est une espèce, une seule espèce, une espèce sur mille, qui fait du miel : l'abeille de ruche. L'abeille, les abeilles, ce sont donc encore 999 espèces, dont personne n'a rien à foutre. Il y en a des grandes noires (xylocopes), des toutes petites (lysoglissiums ?), des collètes du lierre, enfin c'est une diversité insondable. Tout le monde en ignore l'existence. Encore n'est-ce pas tout à fait vrai, jugez plutôt :

L'Union Européenne a calculé que faire le travail de pollinisation, l’œuvre des abeilles, reviendrait à 14 milliards d'euros par an. Ah. Comme les abeilles sont en train de mourir, elles prennent cher - et c'est leur disparition qui nous coûterait cher à nous. Monsanto et d'autres amis financent moult études pour "démontrer" que la disparition des abeilles est due à diverses causes. Laissons ces conteurs noyer les poissons (ça, c'est inoffensif, à la lettre), et avançons, nous, l'hypothèse des pesticides et de l'agriculture dégénérée (cf. les articles à propos de Claude & Lydia Bourguignon). 

J'apprends par exemple ce jour grâce à une journée menée par l'association Arthropologia que les syrphes, ces mouches qu'on prend pour des guêpes ? mais qui sont capables de faire du vol stationnaire, ont besoin de pucerons pour leurs larves et de nectar pour elles, pour aller chercher des pucerons. Si on a des champs gigantesques de salades, les pucerons pullulent. Mais si, aux alentours, il n'y a pas de fleurs pour donner du nectar à ces syrphes, celles-ci ne viendront pas manger les pucerons. Alors l'agriculteur met des pesticides, tous les 15 jours, pour liquider les pucerons. Bon. C'est toute une connaissance, perdue. Comme celle d'utiliser les plantes qui nous entourent, mais on les piétine sans les connaître. J'apprends aussi que la cramaillotte, la confiture de pissenlit est excellente. Étonnant, non ? Que le plantain est un antihistaminique puissant. Enfin c'est sans fin. Deux illustrations encore : le ricin que l'on trouve dans tout parc est mortel, à dose de deux graines pour les enfants, quatre pour les adultes (barème poelvoordien)... il n'y a qu'à se servir pour empoisonner son voisin ; l'amarante aux propriétés nutritives exceptionnelles était largement cultivée en Amérique pré-colombienne, liquidée par les colonisateurs qui voulaient imposer le christianisme et donc se débarrasser des rites solaires en vigueur pour lesquels l'amarante était utilisée... c'est ainsi ce que l'on nomme une civilisation.

D'ailleurs, j'ai lu en même temps Pour en finir avec le jugement de dieu du cher Antonin Artaud. Le bougre et ses Tarahumas est dans le ton.

Les abeilles meurent, pas seulement les abeilles de ruche, pas tellement elles, surtout les abeilles sauvages. Celles que personne ne connaît, et dont tout le monde se fout. Mais, et j'en fus fort ébahi, elles peuvent aussi trouver refuge à la ville. A la campagne, c'est foutu, c'est pesticide à volonté. Mais en ville, on y met des fleurs, beaucoup de fleurs, pour chaque période de l'année, et elles trouvent donc facilement de quoi se nourrir, plus sainement (car les fleurs en question reçoivent beaucoup moins de pesticides que les champs de l'agriculture intensive) qu'à la campagne. Un comble ! 

Toutefois, ces petites bêbêtes qui nichent pour les unes sous terre, pour les autres dans des tiges creuses, pour les dernières dans du bois, ne trouvent pas en ville d'habitat. Un comble aussi. Mais le marché de l'immobilier est en hausse pour tout le monde. C'est pourquoi il faut leur aménager des maisons. C'est toute l'idée du Projet Urbanbees.

Moralité : c'est tout étonnant de tenir entre ses doigts des abeilles, des bourdons, de les sentir vibrer, bourdonner. De vérifier leur absence totale d'agressivité, aussi.

samedi 20 août 2011

Col de la Vanoise et ses lacs




La Grande Casse vue du Col de la Vanoise
Voilà, ça y est, je l'ai fait, depuis le temps que je voulais y aller, y retourner à vrai dire. Le Col de la Vanoise, enfin. 

Départ à 5h30 de Lyon pour joindre les Fontanettes au-dessus de Pralognan-la-Vanoise et se lancer à 7h49. A 1600m, il ne fait pas si chaud que ça, à cette heure-là, alors que toute la nuit durant, la suffocation a du terrasser tous les Lyonnais... Cette randonnée aura eu cette vocation-là, aussi, de rafraîchir le corps en même temps que l'esprit, que la mémoire pour ce retour sur place après... je ne sais pas d'ailleurs. C'est amusant comme les souvenirs sont sélectifs, j'avais retenu le Lac des Vaches, et le Lac des Assiètes, rien du reste. Il faut dire, ils le sont mémorables. C'est une randonnée qui tutoie les 1000m de dénivelée positive, et qui est annoncée en 5h, 6h ça dépend du sens, ça dépend si on fait aller-retour ou boucle, etc. J'ai croisé pas mal de randonneurs (c'est très fréquenté, même si ça reste relatif) monter en début d'après-midi, bon, il fait plus chaud, et puis quand même, c'est long ! Bref, chacun fait ce qu'il veut. 

Moi je pars tôt, à la fraiche, et à l'ombre du Bois de la Glière. Ça envoie sévère ! C'est extrêmement raide. La Cascade de la Glière offre un petit moment de répit, la magnifique cascade. Elle fait également office de brumisateur, au moment où c'est le moins utile certes... Elle se situe à mi-chemin de la première étape d'une heure sanctionnée par le Refuge des Barmettes (1983m), agrémenté de ces remontées mécaniques que j'ai en horreur. Autour, le Mont Bochor au nord-est, et le Moriond au sud-ouest. Je ne m'attarde pas, il s'agit de mettre la plus grande distance le plus rapidement possible entre moi et ces remontées mécaniques, et surtout j'ai hâte d'atteindre le lac des Vaches. D'abord, les vaches. Et ça broute. Toute la journée. Incroyable. Surtout que ces vaches-là n'ont pas de train à regarder passer, et c'est l'incompréhension. Les vaches ont été inventées pour regarder les trains passer. Sans train, une vache reste-t-elle une vache ? Je ne comprends pas. 





Lac des Vaches
Mais je finis par voir non pas le lac, mais l'endroit derrière lequel est le lac. C'est encourageant, et ce n'est absolument pas rageant de le dévisager ce lac. En fait, il ne faut pas se contenter de contempler ce lac, ou ce champ de linaigrettes on ne sait plus. D'ailleurs, en cette fin de mois d'août, il n'est pas si étendu que ça. Il faut s'assoir en son milieu. Car c'est possible, ce lac est séparé en deux par un gué en pierres plates. Assis au centre du Lac des Vaches (1). L'ombre de l'Aiguille de la Vanoise (2797m) l'a délaissé depuis un moment déjà. A 360°, c'est magnifique. Ah ! Je finis par le quitter, et à peine l'a-t-on surplombé qu'il paraît tout petit, tout rabougri, frêle, ridicule. C'est encore une de ses forces. 

Je gagne le Lac Long (2), sévèrement rétréci en réalité. Là je m'arrête, dans les rochers, pour lire parmi mes amies marmottes. Des cris se font entendre, je mets long à repérer les alpinistes, pour ainsi dire à quelques encablures du sommet de l'Aiguille de la Vanoise. Voilà bien quelque chose que je ne pourrais pas faire, mais ça doit valoir le coup, de là-haut ! Quelques mètres après le Lac long, le Col de la Vanoise (2517m) et son Refuge (3). 1h22 de montée, sur 3 annoncées, je suis dans mes temps. Du coup, du temps, j'en ai encore. 




La Grande Motte
Je n'ai pris que la carte 3534 OT, qui s'arrête au Col de la Vanoise, mais je sais que non loin du Col, il y a deux lacs, le Lac Rond, et le Lac du Col de la Vanoise. Je ne sais plus dans quel ordre, mais une fois atteint le premier, je me dis qu'il est à peu près rond. En le quittant, on passe devant une Croix, il faut l'approcher pour... voir scintiller l'autre lac, le Lac du Col de la Vanoise tout occupé à refléter la Lumière du Soleil - divin. Et je décide de poursuivre. Le hic, c'est que c'est tentant d'avancer : on veut voir après ce virage, après cette montée, mais après il y a toujours autre chose, c'est sans fin ! Et ça m'entraîne loin. Quasiment au Refuge d'Entre deux eaux, je n'aurais plus eu qu'à descendre. Mais non, je mange au bord du ruisseau de la Vanoise (4) - il est sympathique, il m'accueille. Cette petite escapade supplémentaire, fort agréable, permet de tourner autour de la Grande Casse (3855m) et d'avoir une vue sur la Grande Motte (3653m) qui a revêtu sa calotte neigeuse, et sur la majestueuse vallée de la Leisse.




Lac des Assiettes
Retour au Col de la Vanoise vers 12h45. Je prends le retour par le Lac des Assiettes (5), asséché, bien entendu, et non par le Lac des Vaches, pour terminer la boucle. 3h annoncées jusqu'aux Fontanettes. Je serais très étonné d'arriver à 15h45. Et en effet, j'étais en sandales à 13h39. Pourtant, la descente est longue et délicate. Vraiment longue, elle demande de la concentration, surtout. Je déconseille de l'emprunter par temps de pluie, car les rochers sur sa première moitié s'avéreraient très glissants ! Mais par un beau soleil, elle est très agréable. Encore faut-il traverser un bout du Ruisseau de l'Arcelin, et ce n'est pas une mince affaire ! Un père y va, successivement avec ses enfants sur le dos, je ne l'aurais pas tenté ainsi, personnellement. Casse-gueule... Une fois le Moriond contourné, par l'autre côté par rapport à ce matin, c'est beaucoup moins technique, facile, et on peut lâcher les chevaux !

Une petite séance d'étirements, et il n'y a plus qu'à rentrer... 3h19 d'efforts pour ces 21,6km. Mais pas de fatigue, je suis affuté.

Parcours et dénivellation : 




Boucle du Col de la Vanoise et ses lacs - Parcours





Boucle du Col de la Vanoise et de ses lacs - Dénivellation

Post-scriptum :

Voyez ce que je lis aujourd'hui :

La Grande Casse est le plus haut sommet du massif de la Vanoise. La première ascension de la grande casse a été réalisée le 8 août 1860 par W. Mathews, M. Croz, E. Favre. À cette époque, le matériel spécifique à l'alpinisme (piolet et crampons) n'existait pas. Ils durent alors tailler 1100 marches dont 800 à la hache pour venir à bout de cette pente de glace - Rando et Balades

N'est-ce pas proprement stupéfiant d'abnégation, ô combien laborieux ?... Ça impose le respect, ça interdit. Mains calleuses obligatoires - au pays d'Ivan le petit sot.


Post-scriptum, bis :

En suivant le ruisseau de la Vanoise, j'avais été fort étonné de croiser beaucoup de monde se rendant au Col de la Vanoise. Je ne comprenais pas très bien d'où ils pouvaient venir, dans mon esprit il n'y avait guère que le GR 55 pour faire le Tour de la Vanoise mais cela signifiait venir d'un refuge pour un parcours de plusieurs jours alors que les randonneurs croisés n'étaient manifestement pas équipés pour. Il s'avère qu'on peut facilement joindre le Col de la Vanoise en partant de Termignon, plus exactement en gagnant le parking de Bellecombe d'où une navette amène au pont de la Renaudière, soit quasiment au Refuge d'Entre deux eaux mentionné plus haut. Plus difficilement, on peut emprunter le GR 5 bien entendu, par le Refuge de l'Arpont. Intéressant...

vendredi 19 août 2011

Un Grand-Duc majestueux



Je pense que la vidéo ci-dessus se passe de commentaire. C'est quand même extravagant. L'auteur a eu la riche idée (elle s'imposait, mais encore fallait-il la concrétiser) d'y associer Also sprach Zarathustra de Richard Strauss. Imagine-t-on plus belle vidéo ? Comme le dit celui qui me fit découvrir cet animal, c'est à regarder en plein écran et résolution maximale (merci la technique).

Sur les crêtes au-dessus de Vaugneray




Vaugneray
Le temps annoncé : grand soleil et forte chaleur ; le temps constaté depuis le bus, ce matin : nuageux, puis pluvieux, inquiétant. Vais-je renoncer ? Ces nuages empruntent le chemin inverse au mien, ça devrait aller, et au pire, je suis équipé. Et puis, la journée est placée sous un signe orageux, sombre : j'ai entamé la seconde partie de La femme pauvre de Léon Bloy, et c'est proprement terrible. Ainsi arrivé-je dans le centre de Vaugneray (V) vers 9h20. L'objectif du jour : gagner le col de la Luère, puis marcher sur les crêtes jusqu'au col de Malval avant de redescendre par le bois du Barthélemy vers mon point de départ. Il vient de pleuvoir, et dès la sortie du village règne donc cette odeur particulière d'herbe puis de sous-bois humides. Se retourner au cours de cette montée assure un spectacle pour le moins géométrique. Les monts dessinent certes des courbes, dont se gaussent les nuages qui y précipitent leurs rideaux aqueux en forme de parallélogrammes? Au loin, Fourvière paraît bien ridicule, et mal en point dans un tel environnement climatique, mais plus loin encore, on devine les premières pentes des pré-Alpes

C'est pourtant de l'avant qu'il s'agit d'aller. Si le soleil se cache encore, il fait pourtant particulièrement étouffant, et mes pauvres petits pieds dyshidrosés souffrent. Mais la Luère (L) est vite atteinte, en 45'. En chemin, quelques mûres bien sûr, quelques châtaignes qui prennent rendez-vous pour cet automne, quelques champignons également, et aussi, quelques coings paumés dans cet endroit peu fréquenté cependant que fort fréquentable. Quelques vététistes, plus tard dans la journée, tout de même... 

Après la Luère, direction le Malval (M) via Saint-Bonnet-le-Froid, qui porte un bien joli nom, à la hauteur du lieu. Un magnifique château fait face à un panorama de son acabit, sur la vallée de la Brévenne. Derrière la route, en retrouvant le chemin, une petite tour (T), une tourette ? au pied de laquelle je m'installe pour lire quelques chapitres d'un écrivain dont on peut se demander s'il est frappé du syndrome tant le gros Léon fait preuve d'une férocité qui doit confiner à l'insulte dans l'esprit des victimes. 

La phrase du jour :
Il n'y a pas de bête aussi nue que l'homme et ce devrait être un lieu commun d'affirmer que les riches sont de mauvais pauvres. (p. 266)

Je reprends ma route, mais cette fois le Soleil donne, et généreusement le bougre, pour aller manger sur quelques rochers du bois du Barthélémy, hélas habités de quelques ouvrières d'une gigantesque fourmilière voisine. Plus tard, le nom "Combe Fusil" (C) m'intrigue et je détourne ma route, pour tomber sur une petite ferme sympathique. Chemin faisant, j'observe poules, oies, chevaux et en oublie que je m'étais dévié de mon itinéraire. Arrivé à "Combe Fusil parking", je me réveille pour constater que je suis bon pour remonter le dernier kilomètre que je viens de descendre... Le chemin de Vaugneray retrouvé, la promenade se termine en espionnant, depuis un bois dévasté par les bûcherons, le vallon sur la gauche parsemé de hameaux qui dominent le village.

Voilà, 2h13 minutes pour ces presque 15 km. Le parcours : 




Crêtes au-dessus de Vaugneray

mardi 16 août 2011

Boucle de Notre-Dame-de-la-Roche




Chapelle de Bel-Air dominant Tarare
Chaude journée auguste que celle-ci ! Mais, diable ! la fatigue doit prendre le pas sur la lassitude, le lymphatisme, l'apathie, la démotivation, sur le découragement. Oui, la fatigue, d'avoir mis ses muscles aussi bien que son esprit en mouvement, celle qu'estompera avantageusement le repos du guerrier, pour qu'il n'en reste que le cheminement - l'essentiel.

Je me rends à Tarare pour parcourir la boucle de Notre-Dame-de-la-Roche. 4h de marche pour ces 12 km sont annoncés par le topo-guide. De la gare, ça fera un peu plus. En route ! Sur la route, d'ailleurs, pour les premiers kilomètres, et, si elle reste assez champêtre, assez bucolique même, elle n'en demeure pas moins une route et une route qui monte, et une route qui monte en plein soleil. Quelques mûres, de-ci de-là permettent de relancer l'effort après l'avoir coupé et rapidement, c'est le sous-bois que nous gagnons en même temps que le chemin. C'est un nous de Louis XIV, parce qu'il n'y a pas âme qui vive sur ce sentier de bleu balisé. Criquets et grillons, criquets ou grillons, que sais-je ? servent de seule compagnie. La rage me prend, le refus de boire cette honte de n'être pas capable de reconnaître les divers arbustes qui composent les haies tout le long du chemin. Cette méconnaissance, c'est une ignorance assez insupportable. Qu'à cela ne tienne, l'heure est à envoyer du bois, une fois entré dedans. Et ce bois de Ségus emprunté pour arriver au Charpenay surplombé par Notre-Dame-de-la-Roche (1), est fort agréable. Il me faut 1h pour atteindre le lieu de pèlerinage, je poursuis quelques minutes ma marche pour pique-niquer à l'ombre d'un jeune chêne, et lire quelques pages de La Femme pauvre, de Léon Bloy. Tiens, les pages où il évoque justement son pèlerinage à la Salette. Enthousiasmant. C'est encore l'industrie pieuse qui est derrière le site officiel.

Seulement dérangé de temps à autres par quelque fourmi ou guêpe attirées par mon repas, ce que je dévore surtout, ce sont les pages de Bloy, un éblouissement. 

Les mésanges bleues du ravissement s'envolèrent et je fus aussitôt replongé dans l'ignoble réalité, dans la très puante et très maudissable réalité. (p. 122)

Mon ami, j'attendais presque cette objection. Voici ma réponse qui sera claire. Nous sommes tous des misérables et des dévastés, mais peu d'hommes sont capables de regarder leur abîme... Ah ! oui, j'ai traversé de sacrées douleurs, articula-t-il d'une voix profonde qui leur secoua les entrailles à tous deux, j'ai connu le vrai désespoir et je me suis laissé tomber dans les mains de ce Pétrisseur de bronze ; mais ne me faites pas l'honneur de me croire si étonnant. Mon cas ne paraît exceptionnel que parce qu'il m'a été donné de sentir un peu mieux qu'un autre l'indicible désolation de l'amour... Vous qui parlez, vous ne savez pas votre propre enfer. Il faut être ou avoir été un dévot pour bien connaître son dénuement et pour dénombrer la silencieuse cavalerie de démons que chacun porte en soi. (pp. 118-119)

Mais l'ignorante Clotilde, qui le voyait et l'entendait pour la première fois, s'étonna d'un homme qui avait l'air de parler du fond d'un volcan et qui naturalisait l'Infini dans les conversations les plus ordinaires. (p. 104)

La personne qui s'offrit alors avait été comparée quelquefois par celui-ci, avec plus d'exactitude que de respect, à un sac de pommes de terre à moitié vide. Elle en avait la tournure et, si on peut dire, la démarche. (p. 145)

Quelle écriture !... Ça interdit. Et ça en fait, des hors-la-loi !...

Alors je reprends mon chemin, une descente, une légère remontée, une nouvelle descente vers la Chapelle de Bel-Air (2). Entre les deux édifices religieux, la vue est superbe sur les monts alentour. Depuis la chapelle, la vue plongeante sur Tarare ainsi que le calme qui y règne me ravissent, à peu près autant que me désespèrent les signes de civilisation moderne : trois antennes ridiculisent la chapelle, et perturbent la sérénité sonore même, tandis que la haie derrière le petit muret sert de dépotoir, malgré les pourtant nombreuses poubelles installées afin de préserver le lieu - mais non !

La descente vers la ville est ensuite très rapide, 2 heures de marche auront suffit pour cette belle boucle, et il ne reste plus qu'à écrire ce que cette journée m'a permis de gagner. Pour ceux que la promenade intéresserait, en voici la carte et le profil : 




Boucle ND de la Roche, depuis Tarare - carte




Boucle ND de la Roche, depuis Tarare - dénivellation

samedi 16 juillet 2011

Petit tour dans la Vallaisonnay




Une photo que je n'ai pas pu faire moi-même, mais elle en aurait été proche
Voilà, c'est fait. Long déjà le temps qui sépare ma dernière chevauchée alpestre, trop long. Alors, en plein préparatifs pour aller marcher en Corse, la tentation est trop forte. Je me décide au dernier moment, alors je ne fais pas dans l'original, mais là où mes souvenirs me portent. Une fois déjà, et certainement deux, j'ai crapahuté autour du Lac de la Glière, non loin de Champagny-en-Vanoise. Retour dans cette terre connue et Montagne adorée. Le Lac de la Glière porte d'ailleurs mal son nom puisque ce n'est plus qu'un cours d'eau ; il reste une des escapades favorites de la Vanoise, car très accessible. Pas question évidemment d'aller barboter avec le public familial. 

4h30, départ de Lyon, avec Olé Coltrane dans les oreilles. Il faut ça - arrivée au Laisonnay d'en bas (1554m) un peu avant 7h. Il fait 9°C (c'est bien), et très beau. Le moral est déjà bien portant, après avoir traversé la vallée depuis Moutiers, et les paysages qui se rappellent à la mémoire comme impressionnants. En route !...

7h15 et la première marmotte sort de sa galerie pour l'épater - suffis-je, comme galerie ? En dehors des marmottes, des merles, des épilobes à épi (pourquoi un tel nom, qui semble redondant ?) et des digitales, il n'y a pas un chat. Je rattraperai une famille vers le refuge de la Glière (1996m) [B], ainsi qu'un petit groupe ; plus tard également, vers le refuge du Grand Plan [C], quelques personnes. Alors l'impression, dégagée aussi bien par la Montagne que par la Marmotte, c'est la sérénité. Elle se réveille tranquillement, sur son rocher de ce versant sud encore ombragé. Deux autres l'imitent, un peu plus haut ; et puis, à partir du Refuge de la Glière, et alors que le Soleil atteint finalement le flanc de montagne, c'est la folie. Ce ne sont que gambades, bonds et courses effrénées parmi la végétation devenue plus rase et la flore plus éparse (quelques gentianes de ci de là). Du coup, je m'offre une première pause après une heure de marche pour atteindre le Refuge.

La deuxième heure de marche sera plus ardue, bien que la pente, elle, ne le soit qu'à peine plus. J'atteins le Col du Palet (2656m) [D] vers 9h. Deux heures et quelques miettes, c'était mon objectif en voyant en bas le panneau "Col du Palet - 4h30". Objectif atteint, mais à quel prix ! Je crois ne jamais avoir autant souffert des jambes en montagne. Que c'est dur ! Le manque d'habitude, d'accord : la dernière randonnée date de l'été dernier avec le Sancy, mais on y arrive à l'altitude de laquelle je pars ce matin, peu ou prou. L'altitude donc, aussi, à laquelle je n'ai pas eu de période d'acclimatation, doit me martyriser un peu. Et puis, j'avais chargé mon sac-à-dos, jusques à des objets inutiles, histoire de ressentir un fort poids sur les épaules en préparation de la Corse. Dernière explication, non des moindres : comme je grimpe seul, je n'attends personne et vais "à mon rythme" c'est-à-dire trop vite, et sans plages de repos - même relatif. Toutefois, cette marmotte-sentinelle qui se dresse, à quelques mètres du Col, sur mon passage pour m'encourager (c'est mon interprétation) redonne un peu de courage. Le panorama, et le petit déjeuner que j'y prends remettent les jambes d'aplomb et le moral au beau fixe. Un combat engagé par un traquet motteux contre une marmotte qui, j'imagine, s'approchait naïvement des petits de l'oiseau, donne une petite touche humoristique.


J'avais pourtant prévu de faire le semi-tour de la Vallaisonnay : après le Palet, le lac de Gratteleu [E], voire celui de la Plagne, puis le col de Plan Séry, et le Py, soit 24 kilomètres. Je préfère réduire un peu en me contentant de la boucle par le col de la Grassaz [Édit : ça ne réduit rien du tout !]. C'est là que je m'arrête, vers 10h45, et après avoir de nouveau connu des difficultés dans les tous derniers mètres du Col de la Grassaz (2637m) [F], pour me reposer en lisant un peu, et manger en face de la chaîne de la Grande Motte (3653m) au Grand Bec (3398m) à laquelle on tourne le dos depuis le début de la matinée. Quelques éboulements depuis l'Aiguille noire font espérer la présence de quelques bouquetins ou autres diablotins. Mais ils sont plutôt derrière, vers le Plan Séry, je crois. Il faudra se limiter aux insectes extra-terrestres, et à ces magnifiques fleurs bleu outremer [Édit : des gentianes printanières], dont le nom m'échappe pour le moment.


Je quitte le Col à 12h15, et arrive à 13h30 au Laisonnay. Le mode descente express a été enclenché. Cette descente me vaudra une petite ampoule au talon gauche. La Lumière m'a atteint en début de journée, il fallait que je fus capable d'en faire moi-même en fin de parcours... Je ne prends que le temps de jouer à cache-cache avec une marmotte qui, littéralement, me passa sous le pied. Je ne saurais dire lequel des deux en fut le plus surpris, toujours est-il qu'elle s'est réfugiée à l'entrée de sa galerie. Je m'assis sur le rocher juste au-dessus, et, un quart d'heure durant, elle fit des allers-retours en me scrutant. Rigolo. C'est ce que je pus raconter au petit garçon qui me demanda pourquoi je courais : "je joue à cache-cache avec une marmotte". Han !




Les presque 24 km de la journée



De retour à Lyon, j'ai déjà bien mal aux jambes. La journée n'est pas terminée pour autant, puisque Brad Mehldau et Joshua Redman sont en concert ce soir à Fourvière (287m) - je monte à pieds, d'habitude, mais là, je ne crois pas. Je vais bien dormir.